mercredi 26 septembre 2007

"Vous n'avez qu'à écrire!"

"Vous n'avez qu'à écrire!"

Il n'a pas tort ce monsieur.

Vendredi, 17h. Je suis dans un couloir nauséabond et obscur, assis dans la crasse à même le sol. Autour de moi, des êtres résignés, brisés, qui ont passé le seuil du courroux et contemplent d'un oeil éteint les ordures qui s'amoncellent. Ils ne savent pas depuis combien de temps, et surtout pourquoi ils sont là.

Je suis station Rogier, et j'attends que mon numéro s'affiche, pour enfin être autorisé à payer mon abonnement STIB. J'ai le numéro 218. Je suis arrivé à 15h, au numéro 201. 17 numéros en 2h, 8 clients par heure. Et nous sommes des centaines. Semaine de rentrée en ce début septembre, tout le peuple bruxellois veut une carte de métro.

Dans une ville normale, ce serait un non-évènement. A Bruxelles, on frôle la crise humanitaire, encore un peu et l'armée installera des tentes, la croix rouge distribuera de l'eau et des sandwiches.

Comment a-t-on pu en arriver la? Il y a à Bruxelles 6 points de vente ou "bootik" pour les usagers du réseau. Chacun compte, grand maximum, 3 guichets. Imaginons que chaque guichet traite 8 clients à l'heure. Ouverte de 10h à 18H, chaque boutique traitera 3x8x8 = 192 clients x 6 = 1152 clients par jour. Bien sûr il s'agit là d'une hypothèse basse. Soyons follement optimistes, et mettons que ces braves guichetiers traitent 2000 clients par jour. Maintenant imaginez combien d'abonnés compte une ville de 2 000 000 d'habitants, sans compter les navetteurs. Vous comprenez maintenant pourquoi pendant une semaine, des files digne de la Pologne des années 80 égaient 6 stations de métro Bruxelloises. Soyons justes, 3 stations, les autres n'étant pas dans le centre.

Il est tout simplement illusoire de penser pouvoir obtenir le précieux (40 euros) sésame qui donnera accès illimité au vaste réseau bruxellois (ses 2 lignes de métro et ses dizaines de tramways aux horaires fantasques), disons entre midi et deux, ou juste avant d'aller au travail. Il faut se résigner à faire la queue pendant 2 ou 3 heures, et donc à ne pas aller au travail.

C'est d'ailleurs ce que font les précieux "médiateurs" de la Stib. Les médiateurs, dans le cas présent, sont de braves hommes et femmes payés pour se réunir à 4 ou 5 à l'entrée de la "bootik" et pour expliquer, à partir de 16H30, à ceux qui pensent pouvoir prendre un ticket, qu'on ne prendra plus de clients. Ce vendredi, un des médiateurs se permet d'ailleurs un "on ne va quand meme pas faire d'heures sup'". Frisson de rage dans la foule. Sachant que je tente depuis 1 semaine de faire cet abonnement, j'ose un "On prend bien une après midi de congé pour être là". Murmure approbatif.

Que n'avais-je pas dit. "Si il y a autant d'attente, c'est parce que les gens s'organisent mal". Je persifle que pour une capitale européenne, c'est quand même un spectacle un peu tiersmondesque et qu'il y a peut être, quelque part, un léger problème d'organisation de la part de la STIB. "Vous n'avez qu'à écrire".

Ben voila...